Design Comportemental — SapiensUx

J'espère que vous prendrez du plaisir à lire cet article … Et mieux encore : qu'il vous soit utile.

🧠 Tous addicts à la récompense, pas à l’info !

UX Design Comportemental, tous addicts à la récompense, pas à l’info !

En Design Comportemental comme dans d’autres domaines, modifier les comportements par l’information est un leurre. 

Le seul à avoir ce pouvoir est le cerveau émotionnel motivé par la récompense, précédée d’un déclencheur et d’une routine. Améliorer toute expérience passe par un travail précis sur (un de) ces trois piliers.

Notre monde ultramédiatisé et marketé entretient un solide malentendu : la conviction que diffuser une information la rendrait automatiquement connue et même que cette connaissance supposée permettrait d’orienter voire modifier les comportements des individus. Grâce à notre système rationnel. Alors que le vrai boss, c’est notre cerveau émotionnel. Il a toujours le dernier mot.

Ce biais d’appréciation ancrée dans nos sociétés est à la source de l’infobésité ambiante et du poids disproportionné accordé à l’information comme agent influenceur sur les comportements, choix et habitudes. 

Or, se contenter de matraquer des infos n’arrête ni la malbouffe, ni l’alcoolisme, ni la tabagie, ni les actes inciviques pas plus que cela n’améliore l’efficacité des écrans ou l’expérience client. 

Une des clés pour modifier un comportement est d’agir sur un des trois piliers de son mécanisme, immuable depuis la nuit des temps : un déclencheur lance une routine qui conduit à une récompense. 

Prenons un fumeur.

UX Design Comportemental, tous addicts à la récompense, pas à l’info !

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Un déclencheur - une heure précise de la journée ou le mimétisme avec une autre personne …

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entraîne sa consommation selon une routine habituelle : sortir pour la pause cigarette, en prendre une, l’allumer, la fumer à son aise,

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et atteindre la récompense d’un besoin physique assouvi et d’une sensation de détente...

UX Design Comportemental, tous addicts à la récompense, pas à l’info !

Tous les discours rationnels ou infos alarmistes n’ont quasi aucune prise sur les comportements des fumeurs ou des buveurs. Le message « fumer tue » ne permet pas de supprimer l’anticipation qu’à le cerveau de recevoir sa récompense en fumant.

La seule parade efficace, comme démontré par les Alcooliques Anonymes, est que :

  • quelque chose de plus fort doit s’intégrer ou se substituer à un élément du mécanisme
  • il est inutile et même contreproductif d’essayer de changer la récompense ou la routine sans proposition d’une autre récompense ou routine capables de séduire notre système émotionnel. 

Pour le fumeur, un moyen est de modifier sa routine : jouer sur une tablette, faire de l’exercice, faire une micro-sieste, parler avec un collègue ou passer à la cigarette électronique permettent aussi d’atteindre la récompense : la détente, avec la santé en plus. 

On peut aussi modifier la récompense. C’est le déclic observable chez les femmes enceintes qui optent pour l’arrêt de la cigarette, nocive pour le bébé. La récompense d’avoir un enfant en bonne santé devient plus importante que celle de fumer.

Comportements de recherche permanente de récompense

Cette ingénierie comportementale dépasse l’alcool ou la cigarette. Tenez-vous bien, elle régit pratiquement tous nos choix de comportements, captifs que nous sommes de notre biologie de fonctionnement

Nous passons tous nos journées d’une recherche de récompense à une autre. 

A cet égard, le mobile est devenu un emblématique déclencheur d’addiction sans aucune substance à ingérer. Simplement par pushs, notifications et autres stimuli multiple remuant notre bain chimique cérébral hyperréactif et tourné vers la récompense qui libère de la dopamine.

UX Design Comportemental, comportement addictif sur mobile

De plus, les mobiles sont toujours dispos, partout. A chaque ringtone (déclencheur) tu te fais ta dose (routine) qui libère ta récompense (dopamine). 

La force du mobile repose en outre sur l’incontournable trinité de paramètres qui guide le choix à poser pour obtenir la meilleure récompense : le délai (le plus rapide), la probabilité (la plus haute) et l’effort (le moindre). 

Et le paramètre « infos » dans tout cela ? Nulle part, sauf s’il se révèle un facilitateur pour accéder plus facilement à une récompense. 

A l’arrivée, l’émotionnel triomphe toujours. Les neurosciences montrent que les mécanismes activés pour anticiper une récompense, ou la vivre, sont identiques. Autrement dit, à force d’apprentissage, le cerveau en phase d’anticipation commence déjà à produire de la dopamine. C’est comme saliver avant de manger, façon chien de Pavlov. Sauf que l’humain y arrive rien que par son imagination.

Homo-Sapiens serait-il prêt à mourir pour un meuble Ikea ?

L’action du non-conscient sur nos comportements digitaux

Le plus fort est que le système limbique va, de manière non-consciente pour l’humain, évaluer en un éclair toutes les options qui s’offrent à lui. 

A ce titre, des expériences ont apporté des éclairages saisissants qui sapent l’illusion que l’homme, autoproclamé rationnel, s’est échiné à construire autour de la pensée consciente comme moteur comportemental. 

Benjamin Libet a bousculé ce postulat dans les années 70. Spécialiste de la conscience humaine et de la notion de libre-arbitre, le scientifique a montré que avant même que quelqu’un fasse un choix, prenne une décision consciente, certaines activités cérébrales opèrent déjà dans le sens du choix qu’il va (ex)poser

30 ans, et une tapée de progrès technologiques plus tard, une autre équipe scientifique enfonçait en 2008 le clou forgé par Libet. Grâce à l’IRM, leurs tests ont prouvé que des personnes placées face au choix de fermer l’une ou l’autre main pour presser sur un bouton qu’ils tiennent, leurs activités cérébrales à l’origine de la pression choisie s’enclenchaient déjà entre 2 et 7 secondes avant que la personne ne verbalise son choix et ne l’exécute … 

Alors que vous, moi, le monde entier, sommes persuadés que nos choix se font consciemment et précèdent toujours l’acte posé. En réalité, le monde du non-conscient s’active toujours en amont de la conscience. A l’abri des avalanches d’infos déversées, en pure perte, pour nous influencer. 

A ce stade, vous vous dites que cette plongée dans les méandres méconnus de notre cerveau nous éloigne de notre sujet favori : l’amélioration de l’expérience client. Et bien, pas du tout. Nous sommes même au cœur du sujet. C’est justement la compréhension des mêmes principes comportementaux et mécanismes de récompense qui permet de mieux penser l’UX et l’architecture d’écrans efficaces

Sur base des fondamentaux d’un cerveau humain piloté depuis plus de 300.000 ans par le système limbique, disque dur cérébral qui mémorise les expériences et les comportements. Les positifs pour pouvoir les reproduire ; les négatifs pour les éviter. Selon le classement binaire « proies »/« prédateurs » hérité de nos aïeux préhistoriques

Face à un écran mobile, en 2019, tout cerveau humain câblé d’un million de milliards de connexions synoptiques enclenche les mêmes fonctions. Seul leur usage diffère d’une personne à l’autre. 

Pour que l’électricien voit la lumière

Créer un écran performant repose surtout sur la compréhension du principe de récompense autant que des comportements.  

Dans tous les domaines. Comme celui des électriciens qui passent quotidiennement commande de matériels et produits auprès de Rexel. Nous avons mené pour l’enseigne un travail de fond sur l’amélioration de leur dispositif digital en se concentrant, entre autre, sur le principe de « récompense », le choix des meilleurs composants graphiques, et surtout la connaissance approfondie des besoins, attentes et comportements de cette catégorie professionnelle. Et le trio vedette qui soutient le tout : déclencheur, routine, récompense évaluée sur base des paramètres délai, probabilité, effort.

UX Design Comportemental, les comportements des électriciens

Un électricien après une harassante journée n’aspire qu’à une chose : commander vite et bien ses produits indispensables à sa survie économique, son travail quotidien. 

Son déclencheur : ce besoin régulier de produits, sa routine : passer commande simplement ; sa récompense : tout obtenir facilement en temps et en heure. Et surtout, ne pas être bombardé d’infos, promos, sollicitations, suggestions que larguent la plupart des sites convaincus que « info donnée = info connue ». 

L'UX DEsign Comportemental aide Rexel à améliorer l’expérience digitale quotidienne de ses clients, dont notre électricien. 

Sans toucher au déclencheur (besoin quotidien de matériel) ni à la récompense (être fourni facilement dans les temps) mais bien en simplifiant la routine : comment passer commande le plus aisément possible, sans être assailli de « prédateurs » (pubs, promos, forêt de produits). 

Nous avons clarifié le site tout en augmentant les éléments promotionnels, plus discrets et fondus graphiquement dans le paysage. Pour aller à l’essentiel, la récompense et la façon optimale de s’inscrire dans la routine quotidienne suivie par l’électricien en s’inspirant de son comportement.

Design Comportemental et mouche dans la cuvette 🙂

Notre vie en société regorge d’autres exemples qui montrent que l’info est une piètre réformatrice de comportements. 

Prenez la propreté en ville et la politique d’interdiction du genre « Ne jetez pas votre papier par terre », alors que d’autres approches, notamment ludiques sont plus efficaces pour changer les comportements. 

Lille a expérimenté des poubelles « paniers de basket » ou «paradis » d’un jeu de marelle, approche ludique qui change le déclencheur : comment jeter son papier. La propreté est un problème de comportement pas d’info. 

UX Design Comportemental, guider les passants vers les poubelles

Un pochoir de marelle sur le trottoir guide la personne à une poubelle, à Lille, le 31 juillet 2018 © AFP/PHILIPPE HUGUEN

Dernier exemple pour la route, bien connu des hommes : la mouche dans la cuvette. Ou comment réduire de 30% l’entretien des urinoirs masculins grâce à un insecte dessiné dans la cuvette à l’endroit précis, calculé par des ingénieurs, ou la dispersion de l’urine est la moins forte.

Savoir que la bestiole servirait de déclencheur comportemental instinctif pour faire dégager un « prédateur » en visant juste, il fallait y penser ! Aucun texte préventif péri-pipi n’aura jamais un tel effet.

Vous voulez aller plus loin ?

Design Comportemental - Marc Van Rymenant

Je vous propose de jeter un œil au programme que j'ai créé pour enrichir vos compétences UX en apprenant à combiner Design, Psychologie & Neurosciences.

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