Design Comportemental — SapiensUx

J'espère que vous prendrez du plaisir à lire cet article … Et mieux encore : qu'il vous soit utile.

🧠 Expérience client — Réflexe 6. Privilégier la vitesse, pas la précipitation.

Design comportemental - Privilégier la vitesse, pas la précipitation

Expérience client, courez, courez, … Mais pour aller où ? Qu’importe, du moment que vous courez.

Dans un monde où l’espérance moyenne de vie des sociétés du Fortune 500 est passée de 75 à 15 ans au cours des 50 dernières années, les clients attendent de plus en plus à vivre une expérience positive et les chiffres mondiaux montrent, comme déjà épinglé, que 80% des employés ne sont pas pleinement engagés dans leur travail en entreprise.

Le rythme des évolutions donne un nouveau sens aux paroles du philosophe grec Héraclite : « Tout est flux, rien ne reste immobile — il n'y a rien de permanent sauf le changement ». Et pour compléter le tableau, citons le biologiste et naturaliste Charles Darwin : « Ce ne sont pas les espèces les plus fortes qui survivent, ni les plus intelligentes, mais celles qui réagissent le mieux au changement ».

Aujourd’hui, plus aucun département d’une entreprise ne peut choisir de ne pas changer, de ne pas intégrer l’expérience client et les enseignements des (neuro)sciences comportementales dans ses pratiques quotidiennes.

La lame de fond qui chahute l’océan entrepreneurial est animée d’un courant puissant : être plus Humain dans les organisations, être plus Humain dans les relations entre entreprises et clients. Ne pas arriver à guérir les entreprises des virus « Homo-Œconomicus , « Design Thinkingus » et autres frénésies pseudo innovantes serait un échec d’adaptation qui pourrait être mortel. Et le temps court … Tic tac, tic tac …

Malgré ce contexte, obnubilées par la culture de l’avoir, nombre de sociétés poussent encore et toujours leurs employés à courir comme des poules sans tête

Expérience client - tout est urgent

Tout doit aller vite. Pourquoi ? Inutile de savoir pourquoi, il faut juste aller vite, de plus en plus vite. Vite, en tous sens, sans autre motif que de respecter des dates butoirs (« deadline », ça veut tout dire), des processus, des objectifs établis pour avoir des résultats, avoir du chiffre, avoir du bénéfice, avoir du R.O.I … 

Alors que nous vivons une crise de l’Humain sans précédent dans laquelle l’emballement, l’affolement, l’agitation, l’empressement, la hâte excessive semblent devenir les normes

Vous n’arrivez pas à suivre ? Qu’à cela ne tienne, nous avons un « chef du bonheur » qui va s’occuper de vous ! Un petit cours de tricot ou une course de drones pour déstresser ? C’est bon, vous êtes à nouveau heureux ? Foncez ! Ne vous attardez pas trop, ne creusez pas, foncez !

Expérience client, éparpillée façon puzzle

En décembre 2019, une grande banque française adresse à mon équipe la demande de consultation suivante : « réunir, pendant 3 journées, sous un format de design sprint, une quinzaine de collaborateurs de différents périmètres et métiers pour traiter de la problématique de la liquidation des contrats de retraite supplémentaire ». 

15 personnes avec 15 puzzles de vie différents dans une même salle. 15 personnes dont la plupart n’ont jamais vu un client ; un puzzle de vie des clients ressemblant à un « Fisher-Price Mon Premier Puzzle des Animaux » composé de quelques grosses pièces faciles à attraper et manipuler par de petites mains. 

En seulement 3 jours, ces personnes avaient pour mission de produire « un flow global représentant le parcours clients omnicanal », flanquées de deux consultants seniors présents pour « animer et proposer des exercices différents en fonction des avancées du sprint design ».

Avec un tel cocktail d’ingrédients toxiques rassemblés, comment éviter la précipitation, les « J’aime bien, j’aime pas » et les suppositions ? Comment ne pas aller vers un compromis, simple reflet d’un « puzzle mix » déconnecté de toute réalité ? En dehors de l’effet thérapeutique sur nos zygomatiques d’une telle demande, je vous laisse imaginer le résultat sur l’expérience vécue par les clients.

Nous avons préféré refuser de travailler avec la banque car la zone de convergence entre les objectifs de l’entreprise et les vrais comportements des clients seraient impossible à trouver dans ces conditions.

Formations, pièges à c*n

A ce jeu de dupes, la vitesse confine rapidement à la précipitation, préludes de tous les dérapages et flops ; mère d’inefficacité et de travail bâclé. Même en brandissant l’intelligence collective, vous savez maintenant que de vouloir accélérer les choses en réunissant 10 employés en atelier de travail ou « Lab » pendant 2 jours ne permettra pas de pondre l’expérience client du siècle. D’autant que quasi aucun des participants n’a jamais rencontré de client, cet être si étrange et insaisissable que l’on observe au travers de statistiques.

Expérience client - en retard en retard

Sans une culture de l’être, les employés ressemblent à des balles magiques creuses qui rebondissent, partout et tout le temps. « Je suis en retard, je suis en retard » clame le lapin dans « Alice au Pays des Merveilles ». La course folle et fébrile est le terreau idéal pour faire pousser à une vitesse V V’ les suppositions gratuites et les appréciations bancales

Alors que vite et bien relève d’une toute autre approche. Celle où la recherche d’efficacité ne brûle aucune étape essentielle, se donne le temps de recueillir toutes les données pertinentes sur les clients et s’appuie sur l’intelligence naturelle pour atteindre son but dans les temps, raisonnables, impartis. Le tout rapidement.

Faire bien ce qui compte vraiment (les comportements) et seulement ensuite faire vite ce qui compte le moins (les objets) 

Vouloir faire vite ne signifie pas courir dans toutes les directions. Autrement dit, pour faire une chose vite et bien, il faut redoubler de concentration et non sauter ou brûler les étapes essentielles. Qui sont toujours les mêmes : analyser l’expérience anticipée et l’expérience effective des clients pour déterminer le comportement cible et ensuite seulement concevoir les objets permettant de générer ce comportement. L’idée du réflexe n°6 « Privilégier la vitesse, pas la précipitation » est de faire vite ce qui compte le moins (les objets) pour pouvoir faire bien ce qui compte vraiment (les comportements)

Vous vous souvenez que dans un précédent réflexe, je vous ai parlé de l’expérience de développement d’une nouvelle application mobile pour le groupe mondial de distribution de matériel électrique. Je vais vous dévoiler ce qui a précédé l’intervention de mon équipe.

Des consultants « CX » externes d’une entreprise prestigieuse de conseil avaient été mandatés par le groupe pour animer deux jours de « Design Thinking » pour « dégager des parcours afin d’enchanter les clients ». J’appris plus tard qu’étaient présentes aux sessions de travail 10 personnes dont un responsable logistique, deux personnes du marketing, des membres du service IT, un responsable de région, un chef de projet, … L’objectif fixé était qu’au terme des deux jours, quatre parcours clients devaient avoir été traités.

Un planning dément rythmait les deux journées de réflexion :

  • 30 minutes pour définir les activités clés des clients, 
  • 5 minutes pour présenter des personas,
  • 90 minutes pour définir un parcours-type à coup de post-its, …
  • A la fin de la session, une centaine de petits papiers colorés — divisés en « Emotions », « Activités » et « Outils » — censés détailler la vraie vie d’un électricien, étaient placardés sur un mur. Sur base de cet exercice pour le moins précipité, 12 écrans de l’application mobile avaient été imaginés avec l’ambition de représenter les tâches que demain « Bob l’électricien », en bon Homo-Œconomicus, réaliserait sur sa nouvelle application.
  • Pour immortaliser la fin de ce marathon, une photo de groupe fut prise et une séquence vidéo réalisée sur la session. 

A présent, imaginez un instant un (vrai) électricien qui dans la (vraie) vie se démène sur un chantier et s’aperçoit qu’une pièce manque.

Et que sans cette pièce, il ne pourra pas terminer le chantier sur lequel il se trouve et qu’en plus, demain il ne sait pas revenir car un autre chantier l’attend.

Il se connecte dare-dare sur l’application pour commander d’urgence son matériel manquant et … tadaaa ! Selon la démo découlant du brainstorming créatif, cela donnerait ceci : « Bob se connecte sur la nouvelle application et reçoit devant lui une série de petites images : une maison, un chantier, … A la façon Tinder, il va choisir si il est installateur résidentiel ou non, … cela nous permet de segmenter Bob. Ensuite, on va continuer à lui montrer de petites photos pour l’inciter à nous dire quels produits ils utilisent régulièrement, … Déjà à ce niveau Bob est super satisfait … ». Je vais m’arrêter là.

Voilà une équipe qui par précipitation, à la sortie d’un marathon de deux jours en mode « Design Thinking », était persuadée d’avoir rassemblé les besoins des clients et s’étaient précipités dans la création d’objets.

Lorsque mon équipe fut mandatée par le CEO belge pour concevoir concrètement la nouvelle application, nous avons été informés du travail réalisé lors des sessions de « Design Thinking ».

Afin de construire le puzzle de vie du client, nous avons demandé à avoir accès aux données, aux études clients, … qui avaient été utilisées lors des sessions. On nous répondit qu’en deux jours, rien de plus n’avait été fait que de phosphorer en groupe. Vous connaissez la suite … En l’absence de toutes données objectives sur les comportements réels des clients électriciens en mobilité, nous avons donc rassemblé plus de 500 pièces de l’énigme de son quotidien au travers de statistiques corrélées, d’analyses des commandes, de visites sur le terrain. Mes collaborateurs et moi-même avons accompagné de nombreux installateurs durant leurs longues journées, de 7 heures du matin jusque tard dans la soirée.

En ne sautant aucune étape importante, sans précipitation mais en vitesse — moins de 3 semaines —, nous avons découvert des fonctionnalités concrètes jamais verbalisées auparavant par les clients et jamais traitées par aucun concurrent.

Face aux données réelles rapportées par mon équipe, aucun des éléments travaillés avec précipitation lors des sessions de « Design Thinking » n’ont tenu la route. En effet, aucune des solutions proposées dans l’agitation précipitée de ces sessions ne correspondaient à la réalité comportementale des électriciens, et aucun écran initialement imaginé n’a été retenu dans l’application finale. Heureusement, car le projet se serait soldé par un échec retentissant après avoir investi des sommes énormes de développement.

L’attention de la direction du siège étant orientée exclusivement vers le timing et les coûts (comme nous le détaillerons dans le réflexe n°7), le projet a versé dans la précipitation au lieu de simplement s’élaborer vite et bien. L’effet redoutable étant qu’une fois la spirale de précipitation enclenchée, tout le projet ne pouvait qu’amplifier la précipitation de son exécution.

Expérience client - Réflexe n°6. Privilégier la vitesse, pas la précipitation.

En imposant une vitesse saine, le réflexe n°6 propose d’utiliser l’ensemble des autres réflexes afin de regarder et écouter attentivement les clients au lieu de juste les voir et les entendre sommairement, voire pas du tout.

D’autant que les travaux des chercheurs Jiyao Chen, Richard Reilly et Gary Lynn rétorquent impitoyablement l’idée reçue selon laquelle précipiter un projet serait synonyme de performance.

Le trio scientifique a étudié la relation entre le temps écoulé de l’idée initiale à la mise sur le marché et la performance — en termes de chiffres d’affaires, part de marché, R.O.I. et rentabilité — sur une base de 471 nouveaux produits.

Expérience client - enfanter

Leurs travaux ont corroboré la vérité énoncée par Fred Brooks auteur du « Mythe du mois-homme » que rassembler 9 femmes dans une même pièce pour faire un bébé en 1 mois fonctionne beaucoup moins bien que de laisser une seule maman prendre 9 mois, même si les 9 premières femmes étaient accompagnées d’un consultant animateur de « Sprint Design »

Et si vous pensez que les compétences ne sont pas nécessaires lors de session d’intelligence collective, je vous laisse imaginer vos chances de succès si vous remplacez les femmes par des hommes, même en leur laissant deux fois plus de temps pour réaliser le projet.

Leur étude démontre que la performance fond comme neige au soleil lorsque l’on cherche à réaliser un grand nombre de choses en un laps de temps réduit au lieu de les étaler dans un temps raisonnable.

Le nombre de produits/services se soldant par un échec est la preuve indiscutable que confondre les deux notions est dangereux. Au lieu de chercher à aller le plus vite possible, l’étude démontre qu’il vaut mieux ra-len-tir le rythme et appliquer le réflexe N°6 «Privilégier la vitesse, pas la précipitation ».

Design Comportemental - Guillaume Gendron

Guillaume Gendron

Innovation & Digital Transformation

« Tout ce que vous apprendrez avec Marc sur un projet de performance va changer votre façon de penser / faire les choses. »

Je remercie Marc de m'avoir conduit dans une nouvelle étape de l'expérience utilisateur à l'aide des « neurosciences ». 

Tout le monde peut participer à la conception d’expérience client positive en travaillant avec quelques bons réflexes.

Il s’agit bien plus d’un état d’esprit à retrouver en re-développant le savoir-être, avant le savoir ou le savoir-faire. Une fois cette culture initiée, les techniques prennent tout leur sens.

De mes missions de terrain durant plus de deux décennies, j’ai dégagé 9 réflexes que toute entreprise peut adopter pour gérer l'expérience client. Et cela, à son rythme, dans l’ordre qui lui convient, en fonction de ses besoins et capacités. Non pas pour faire d’un coup la révolution mais s’offrir les évolutions nécessaires menant à délivrer une expérience client digne de ce nom.

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